REINES ET FEMMES ENGAGÉES : Wangari Muta Maathai

Les Enfants de Gikuyu

Y avait-il meilleur Peuple ? Y avait-il meilleur cadre culturel pour attirer cet Esprit dans cette matière eu égard de la mission qui devait être sienne ? Sûrement pas.

Lorsque cette Étincelle qui allait devenir celle que nous avons connue pour ses engagements demande à l’Ancêtre Gikuyu l’autorisation d’être sa Fille pour un temps. Celui-ci ne peut le lui refuser.

La Mère de la Nature © vudaf.com
Statue de Dedan Kimathi à Nairobi ©wikipédia

20 ans plus tôt, les matrones de Nyeri s’étaient réunies pour accueillir l’un des futurs visages de la lutte des Nubi pour la libération du joug colonial.

Elles avaient accueilli ce petit garçon, l’avaient nourri du Sang de Gikuyu, le préparant ainsi à mener une lutte sans merci.

Aujourd’hui, en ce jour du 1er Avril de l’année 1940, 20 ans après Dedan Kimathi, les matrones de Nyeri sont de nouveau réunies pour la venue d’une grande Âme.

Elles accueillent conformément à la Tradition Kikuyu, celle qui deviendra la voix des Femmes au Kenya et l’une des voix de la Mère-Terre dans le monde.

Cette Dame qui nous est venue tout droit des pentes fertiles du majestueux Kirinyaga (Mont Kenya) est aussi, par ses engagements devenue une des figures fortes de la Terre de Nubi. Elle a porté, pour ce temps, le nom de Wangari Muta Maathai.

Wangari Muta Maathai ©Thenewyorktimes

Une Âme forgée dans le sang de NuBi

Une case traditionnelle ©pinterest

Ces engagements qui sont devenus les combats d’une vie tiennent à deux choses :

L’Amour qu’elle a porté pour le Tout, pour tous sans distinction aucune,
favorisé par une culture qui élève la Vie sous toutes ses formes au rang du sacré, une culture qui intègre dans les gènes de ses enfants le courage de se lever pour la Vie.

Précisons. Wangari Maathai est forgée dès son jeune âge dans le « sang » Kikuyu.

Elle naît et grandit dans un peuple Nubi et Ntu, donc animiste et agriculteur en premier lieu.

Dès lors, elle développe, comme tous les autres Agikuyu, et les Nubi plus généralement, un lien à la Nature qui se caractérise par une considération qui va bien au-delà de la matière.

Voilà où nous devons voir l’un des socles de ses futurs combats. D’ailleurs, ce lien à la Nature guidera de tout temps ses futurs choix.

La nature dans toute sa majesté ©flikr

La soif d'apprendre

Wangari, femme engagée pour l’éducation et la sensibilisation de la jeunesse aux problèmes environnementaux ©nonviolence.ca

 Dès son jeune âge, Wangari Maathai manifeste la volonté de briller au plus haut pour les siens. Elle fait part d’un appétit remarquable lorsqu’il s’agit de la connaissance, et ce quelle qu’en soit la provenance.

Malgré l’accès encore difficile pour les femmes à l‘instruction, elle réussira à suivre un cursus jalonné de coups d’éclats, elle tirent, des commentaires admiratifs à son entourage.

Parallèlement à l’initiation dévolue à chaque petite fille Kikuyu, c’est à la Ihite Primary school que la jeune Wangari suit son cursus primaire.

Ses études secondaires l’emmènent ensuite à Limuru, au Couvent Loreto, une école de filles. C’est là que les choses basculent : Ses professeurs, impressionnés par la vivacité d’esprit et la soif de connaissance dont Wangari fait montre, décident d’entamer des démarches pour l’aider à continuer ses études aux Etats-Unis.

Classe à l’école primaire de Ihite ©teammutomo.blogspot.com

Arrêtons-nous un instant pour saluer l’intelligence et l’ouverture d’esprit dont les parents de Wangari ont fait preuve. De fait, dans les années 40, l’instruction est quasiment fermée aux femmes, surtout dans les zones rurales.

Par cet acte, ils se sont ainsi alignés sur la volonté des Anciens, permettant à leur fille d’entrer dans cette catégorie de Guerriers Nubi initiés aux connaissances et aux idéologies du monde dans le but d’être toujours plus forts et plus à même de travailler au bien du plus grand nombre. Continuons donc.

La voilà qui s’envole en 1959 grâce au Students Airlift Programme (en collaboration avec l‘African-American Students Foundation et mis en place par Tom Mboya) pour le Kansas.

Grâce à cette bourse, elle peut alors mener des études universitaires au Mount Saint Scholastica College dans la ville d’Atchinson.

Bibliothèque commémorative Feeney, Mount St. Scholastica College, Atchison, Kansas© librarypostcards.blogspot.com/
Wangari Muta Maathai, un regard franc et un sourire généreux ©pinterest

En 1965, Wangari, devenue une jeune femme pleine d’ambition devient la première femme de Nubi Est à obtenir une Licence en Biologie.

Remarquons que le choix de la Biologie vibre de concert avec l’Amour que la Kikuyu porte pour la Vie et le Respect qu’elle a pour son caractère Sacré.

Wangari Maathai aime, et entièrement. Ça sera cela son moteur dans sa vie de militante, mieux, de Guerrière.

Après un bref passage à Pittsburg (Pennsylvanie, USA), suivi d’un passage plus long à l’Université de Munich (Allemagne), elle finit par retrouver sa terre, le Kenya.

C’est à l’Université de Nairobi, en 1971 qu’elle obtient son Ph.D. (Doctorat) en médecine animale. Elle devient par la même occasion la première femme du Pays à avoir un Doctorat.

La fontaine de la connaissance, Université de Nairobi © wikipédia
Université de Nairobi ©wikipédia

Dès lors, tout s’enchaîne dans cette Université pour la brillante Wangari Maathai. Elle devient tour à tour Enseignante d’anatomie animale, Directrice du département auquel elle est rattachée, puis Doyenne de l’Université de Nairobi. C’est forte de ce statut que l’Universitaire devient la militante.

Dans le même temps, elle dirige la branche kényane de la croix rouge (1973-1980).

Sa carrière est déjà lancée, son ambition la conduit vers les hautes sphères du milieu intellectuel de son pays.

Pourtant, Wangari pense à sa Terre de naissance, Wangari pense aux pentes fertile de Kirinyaga, Wangari pense au pays Kikuyu.

Mont Kenya ©flickr

Retour en Terre Kikuyu

Car, son retour est marqué par le constat alarmant qui s’impose à elle sur l’évolution du patrimoine naturel du pays Kikuyu.

Cédons-lui la parole :

« Je fus frappée par l’aspect boueux des rivières qui, à la saison des pluies, dévalaient les collines et charriaient de plus en plus de limon : l’érosion des sols était à l’œuvre. Je remarquai également que les vaches étaient si maigres qu’on aurait pu leur compter les côtes. Les prairies ne donnaient plus assez d’herbe et de fourrage et, à la saison sèche, l’herbe était très pauvre en éléments nutritifs. Les villageois semblaient également moins bien nourris et leurs champs plutôt clairsemés. Les sols avaient été épuisés et les rendements agricoles s’en ressentaient « 

Une militante au chevet de la nature maltraitée par les Hommes ©continentpremier.blog.tdg.ch
Wangari, travailleuse acharnée pour la reforestation du pays Kikuyu ©britannica.com

Il faut savoir qu’avec la colonisation et l’idéologie capitaliste inhérente, l’abandon des traditions et coutumes par une part importante de Nubi, les pentes de Kirinyaga (et les terres Nubi en général) ont connu une spéculation non contrôlée et un déboisement excessif en vue d’une production toujours plus massive de cultures dans l’optique de la vente.

L’une des conséquences les plus importantes de cette tendance reste outre la destruction de biotopes, l’érosion des sols qui entraîne souvent des glissements de terrains meurtriers.

Avant, il y avait moins de monde dans les collines, les gens pratiquaient l’agriculture itinérante. Mais les cultures de rapport tels le café et le thé ont été introduites par les Britanniques.

Tout comme les plantations pour le bois de construction à la place des pâturages. Le colonisateur voulait des arbres à croissance rapide, qui puissent aussi assécher les terrains trop humides destinés à l’agriculture intensive : avec le “développement” à l’occidentale est arrivé l’eucalyptus, qui a pompé l’eau des sols et détruit l’écosystème naturel en asphyxiant les plantes indigènes

En hommage à la mère de la nature, bande dessinée © amazon.com

Wangari Wa miti

Wangari Muta Maathai, fondatrice de Green Belt Movement en 1977 ©amazon.com

Wangari Muta Maathai poursuivait son questionnement :

 » Que devrons-nous faire pour conserver cette forêt ? Me suis-je demandé.

Alors que j’essayais d’encourager les femmes et les Africains en général à comprendre la nécessité de protéger l’environnement, j’ai découvert combien il est crucial de retourner constamment à notre héritage culturel. »

Wangari Maathaï décide de réagir. Sa vision est claire. Elle sait au fond d’elle-même, en son Âme de fille de Gikuyu l’importance du lien avec la Nature.

Elle sait que la dégradation des conditions de vie des siens tient premièrement à l’abandon progressif d’un mode de vie, d’une culture qui inculque un certain respect de la nature.

Elle le dira d’ailleurs dans nombre de ses interventions comme dans cet article rédigé en 2004 pour le Resurgence Magazine qu’elle titrera « The cracked mirror » (le miroir fêlé).

Motivée par cette conviction, elle fonde le Mouvement de la Ceinture Verte ou Green Belt Movement en 1977.

Logo the Green Belt Movement ©greenbeltmovement.org

Cette organisation est connue pour son positionnement contre la déforestation, et pour ses actions telles que la plantation d’arbres.

On estime aujourd’hui à plus de cinquante millions le nombre d’arbres plantés par Green Belt seulement au Kenya. Ces actions ont valu à la militante le surnom de « Wangari wa miti » (Wangari des arbres).

Parlons de cette organisation qu’est le Green Belt Movement (GBM), mais avant, précisions encore.

Wangari la Nubi

Disons-le clairement : Nous sommes des Nubi.

Le combat de Wangari Maathaï ne se résume pas à la plantation d’arbres.

Il est multiple, et un à la fois, à l’image de la Culture et la Tradition Nubi qui le sous-tendent.

La révolution des arbres avec la main bienveillante de Wangari Maathai © fr.blog.ecosia.org
L'impressionant Mugumo ©facebook.com

Chez NuBi, les arbres et la végétation en général sont le biotope de nombreux êtres vivants.

Ils sont eux-mêmes une réserve formidable en substances diverses et variées servant autant pour l’alimentation que pour la médication.

Ils sont plus encore, au-delà de la matière, des Êtres doués de vie, parcelle de l’Absolu, Ngai.

Ils sont donc partie d’un Tout, de cette grande Nature toujours aussi rigoureusement ordonnée. Nous sommes des Nubi, regardons les engagements des nôtres dans un prisme Nubi afin de les appréhender dans leur totalité et avec toutes leurs implications.

Lorsque Wangari Maathaï fonde donc le Green Belt Movement en 1977, il ne s’agit pas d’un mouvement qui se range dans l’idéologie « écologiste », il s’agit bien d’un Acte qui s’ancre dans la Préservation de l’Ordre, puisque les Actes de NuBi sont posés avant tout en vue de préserver ce même Ordre.

Le Green Belt Movement

Le Green Belt Movement, parlons-en.

Connaissant le mode de vie Kikuyu essentiellement basé sur l’agriculture, le Mouvement de la Ceinture Verte naît de la volonté de Wangari Maathai de permettre aux habitants de la région centre d’avoir de nouveau accès aux ressources naturelles qui leur permettaient d’assurer la vie de leur foyer.

L’objectif premier est donc d’assurer une nouvelle source de nourriture, étant donné que les terres fertiles des pentes du Kirinyaga ont été dévastées par les plantations de cultures commerciales, mais aussi l’Eucalyptus introduit plus tôt par les Britanniques, qui appauvrit et acidifie la terre.

La contribution du Dr Wangari Maathai, fondatrice de Green Belt, pour la reforestation de son pays, un exemple largement suivi par d’autres ©parabola.org

Ouvrons une parenthèse : Dans la même période, elle intègre également le « Maendeleo ya wanawake » (Conseil national des Femmes du Kenya) jusqu’en 1987. Elle est désignée pour diriger ce Conseil en 1981. En répondant à cet appel, elle s’inscrit toujours plus dans cette logique d’Ordonnancement de la Nature, comme Ngai l’Ineffable fit avant NuBi.

Oui, car en fondant une société matriarcale, NuBi respecte l’Ordre mis en place par la Mère Nature. Dès lors que ses fils, ont bouleversé cet Ordre en instaurant le patriarcat, les Anciens n’ont eu de cesse que de travailler au retour à l’Ordre. Wangari Maathai s’est alignée sur la volonté des Anciens. Elle a mené une lutte acharnée pour l’émancipation de la Femme Kényane.

En réalité, l’action de Wangari est donc double. Elle vise la préservation et la sauvegarde de la Nature, par l’épanouissement et la réhabilitation de la Femme en tant que pilier de la société.

D’abord orientée sur le pays Kikuyu, elle s’élargira peu à peu à l’ensemble du Kenya dans un premier temps, puis sur le continent Nubi dans un second temps. Tout au long de sa vie, elle prônera l‘importance de la Femme dans le redressement de la société et l’éveil des consciences à un « mieux vivre ensemble ».

Le GBM et le combat pour la réhabilitation de la Femme sont donc singulièrement liés. C’est d’ailleurs via le Conseil National des Femmes du Kenya que le GBM sera fondé. Wangari Maathai n’en prendra la direction effective qu’à partir de 2002.

Wangari Maathai associera donc dès le départ et en priorité les femmes Kikuyu, Kényanes, puis Africaine aux actions du GBM.

L'ombrageux Muiri ©tropical.theferns.info

Au départ, GBM encourage donc les femmes Kikuyu à planter des espèces locales avec 5 objectifs :

  • Stabiliser les sols afin de prévenir l’érosion
  • Stocker l’eau de pluie
  • Créer une nouvelle ressource en nourriture
  • Créer également une nouvelle ressource en bois
  • Générer pour elles-mêmes un revenu financier par leur travail.

Aujourd’hui, rien que dans la chaîne des Aberdares et sur les pentes du Mont Kenya, mais aussi dans les lieux publics des localités de la région centre, GBM a planté plus de 2 millions d’arbres ou de graines depuis 2006. Dans cette région, seront replantés entre autre : Le Muiri ou Prunier d’Afrique.

Ses fruits sont consommés par de nombreux animaux.

Il est utilisé en médecine traditionnelle pour soigner diverses affections, notamment la malaria, la fièvre, les douleurs d’estomac, il aurait des effets sur des sujets atteints d’un cancer de la prostate.

Le Mutundu, dont le bois est prisé pour la fabrication du charbon de bois notamment.

Le solitaire Mutundu ©wikipédia
Le majestueux Mugumo ©wikimedia

Mais aussi le Mugumo. Arrêtons-nous un instant sur cet arbre qui sera évoqué au moment de voir les Rites et Cultes Kikuyu.

Comme dit précédemment dans la rubrique Us et Coutumes, cet arbre est sacré dans la Tradition Kikuyu.

Il est connu comme étant celui au pied duquel Gikuyu, l’Ancêtre fondateur rencontra Mumbia. Les noces sacrées de ces deux Êtres donneront naissance aux neuf filles qui sont l’origine même des neuf clans Kikuyu.

Le Mugumo n’est donc pas coupé, ni même exploité de quelque manière que ce soit.

Une fois de plus, laissons à Wangari Maathai le soin de nous le présenter:

« Il fallait ramasser du bois pratiquement tous les jours pour alimenter notre foyer et c’était une corvée dont je m’acquittais souvent.

Il y avait dans les environs des centaines de Mugumo, ces immenses figuiers sauvages à l’écorce aussi grise et épaisse qu’une peau d’éléphant…

Quand elle m’envoyait chercher du bois, ma mère me mettait en garde : je ne devais surtout pas prendre de bois sous notre figuier, ni autour, car chez les Kikuyu, le Mugumo est l’arbre de Ngai et l‘Homme n’a le droit ni de l’utiliser, ni de le couper, ni de le brûler…

Je comprendrais par la suite que ces figuiers séculaires indiquaient la présence de réserves phréatiques. Leurs puissantes racines creusent dans le sol des failles et des fissures par lesquelles les eaux souterraines remontent vers la surface… »

La beauté de la nature ©flickr
Wangari, la reine des Arbres ici en action avec Green Belt, son mouvement écologique. ©urnabios.com

Progressivement, les activités du  GBM se sont diversifiées.

Aujourd’hui, l’organisation est également au centre de séminaires et de manifestations de sensibilisation et d’éducation à la prise en compte de l‘environnement.

Ces séminaires ont trois objectifs majeurs :

  • Equiper les communautés des outils et les doter des compétences nécessaires afin qu’elles s’organisent en groupes actifs de plantation d’arbres
  • Montrer aux communautés comment la protection et la bonne gouvernance de l’environnement peuvent se mettre en place aux échelles locale, régionale et nationale
  • Mobiliser les leaders et faire appel au sens éthique des communautés afin de préserver la Nature des comportements nocifs.

GBM s’est également impliqué dans les campagnes de défense des ressource naturelles et de l’environnement au Kenya, mais aussi dans d’autres pays tels que le Congo ou encore l’Afrique du Sud.

Le GBM prendra une pleine dimension internationale en 2004 avec le prix Nobel reçu par sa fondatrice, ce qui donnera au mouvement un poids non négligeable.

Elle est d’ailleurs présente dans de nombreux pays étrangers tels que l’Angleterre, les États-Unis d’Amérique et le Japon.

Wangari Muta Maathai © vivafrik.com

Wangari grandit encore

Wangari Muta Maathai ©parisglobalforum.org

Revenons-en à la progression de notre étoile. Nous sommes donc à la fin des années 1970. Wangari Maathai prend de l’ampleur.

Son caractère fort et sa dévotion pour la cause lui coûtent cher sur le plan de sa vie maritale, puisqu’en 1979, son mari demande le divorce, justifiant sa demande par son incapacité à « maîtriser » sa femme.

Disons-le autrement : Wangari Muta Maathai est une femme qui a un cœur à la dimension du Monde. Il n’en avait pas la mesure.

L’honnêteté de Wangari sur son sentiment après ce divorce prononcé lui vaut un séjour en prison, le premier d’une longue série.

Wangari grandit … Trop vite ?

De fait, à partir du moment où elle fait valoir ses positions, mettant à mal certains acteurs politiques de son pays, elle devient une menace, et est traitée comme telle.

Notamment lorsque le pays est sous la direction d’Arap Moi. Elle s’oppose à de nombreux projets immobiliers orchestrés par le gouvernement en place dès le début des années 90.

Il se dit à ce moment que Daniel Arap Moi, deuxième président de la République du Kenya, a dans l’idée de renverser le leadership Kikuyu qui s’est mis en place depuis la fin de la révolte Mau Mau (1960) et l’indépendance (1963).

Quoi qu’il en soit, les rapports entre la militante et le président ne seront jamais qu’orageux.

Daniel Arap Moi ©wikipédia
Forêt tropicale ©wikipédia

En 1989, elle brave les autorités pour sauvegarder le parc Uhruru de Nairobi alors voué à disparaître pour céder la place à des gratte-ciels.

Elle s’oppose avec succès à la destruction de plusieurs hectares de forêt pour la construction de la maison d’Arap Moi en 1998. Ceci lui vaut d’être emprisonnée et sévèrement battue.

Elle sera très souvent emprisonnée ou attaquée physiquement pour ses coups d’éclats.

Ces quelques épisodes marquent considérablement l’opinion publique (nationale et internationale).

Sur la scène politique

En 1997, elle se présente aux élections présidentielles sous la bannière du Liberal Parti of Kenya (LPK), mais échoue, trahie par les membres de son propre parti qui la retirent sans l’en avertir.

Elle siège néanmoins au parlement Kényan de 2002 à 2007.

En cette année de 2002, Mwai Kibaki accède à la Présidence.

Il la nomme en Janvier 2003 Ministre Adjoint en charge de l’Environnement, des Ressources Naturelles et de la Faune Sauvage.

Elle claquera la porte du gouvernement Kibaki en 2005 suite au référendum constitutionnel qui donnait plus de pouvoir au Président sur ses Ministres.

Peu de temps après, Wangari Maathai transforme le LPK en Mazingira (Environnement en langue Swahili). Elle restera impliquée dans la vie politique du pays jusqu’à sa mort six ans plus tard.

Wangari Muta Maathai, femme aux convictions profondes ©womensmediacenter

Sur la scène Internationale

Sur la scène internationale, Wangari Maathai demeure très active. Toujours en 2005, elle devient Présidente du Conseil Économique Social et Culturel de l’Union Africaine et ce, jusqu’en 2007.

Elle est également ambassadrice volontaire pour la forêt du Bassin du Congo et co-gérante du Fonds pour le Bassin du Congo.

Militante auprès de toutes les couches de la société

Des femmes aux figures politiques, en passant par les exploitants (petits ou grands), les élèves et les jeunes diplômés, Wangari Maathai n’a de cesse d’éduquer, de conscientiser et d’éveiller.

Par des manifestations, des actions de reboisement, des tribunes ou articles, des livres, des discours ou même des cours, elle se donne tout entière pour le bien du plus grand nombre.

Les militants de la Green Belt Movement au Kenya ©Usaid.org
Le célèbre symbole du VIH ©futurascience

Wangari Maathai se bat également pour éveiller les consciences sur les ravages du VIH. Ses actions sont majoritairement tournées vers les jeunes et les femmes qui sont les plus touchés.

Elle s’attelle à l‘éducation et sensibilisation par le biais d’articles, de discours, et d’actions menées avec des associations.

Entre la déforestation, le VIH, la corruption, la pauvreté ou encore la place de la femme dans la société, elle n’hésite pas à utiliser sa renommée et son impact au niveau international pour sensibiliser l’opinion mondiale à ces fléaux qui gangrènent la Terre de NuBi.

La Reconnaissance

Dès les années 1980, les combats de Wangari Maathai lui confèrent une aura en accord avec la dimension de son Coeur : Mondiale.

Elle a reçu de nombreuses récompenses et distinctions. 

Wangari Maathai, première femme africaine à recevoir le prix Nobel de la Paix pour sa contribution à la lutte contre réchauffement climatique ©jeuneafrique.com
Prix Nobel de la Paix en 2004 ©senenews.com

On peut noter :

Le prix Nobel de la paix qui lui est décerné en 2004,
Mais avant ça, le prix Nobel alternatif en 1984.

Nous pouvons aussi citer :

  • Le prix Goldmann pour l’environnement en 1991
  • Le Hunger Project’s Africa Prize for Leadership en 1991
  • La médaille Edinburgh en 1994
  • Le prix Petra Kelly en 2004
  • Le prix Sophie en 2004
  • La Légion d’honneur (France) en 2006
  • Docteur Honoris Causa de l’Université Soka (Tokyo, Japon) en 2008

Elle est entre autres nommée membre honoraire du Club de Rôme, conseillère honoraire au Conseil pour l’Avenir du Monde, et est appelée à intervenir lors de conférences en lien avec l’avenir mondial telles que la Conférence de Copenhague en 2008.

Elle écrit également des articles pour diverses revues telles que le Resurgence magazine.

Mais de toutes ces récompenses et distinctions reçues de par le monde, la plus importante reste sans aucun doute celle qui la ramena chez elle, à Nyeri, en pays Kikuyu où lors d’une cérémonie, un Mugumo est planté en son honneur.

Quelle récompense plus belle pour cette Fille de Gikuyu ! Parée de ses attributs traditionnels, elle reçoit alors la Reconnaissance de tout un Peuple, de toute une Culture.

Elle repose pour une Éternité

Et quelle date funeste que celle du 25 septembre 2011 !

La perle Kikuyu quitte cette matière, succombant à un cancer à l’hôpital de Nairobi. Elle a alors 71 ans.

Wangari Maathai est partie comme elle a vécu : en toute humilité, et toujours avec le souci du bien de la communauté. De fait, dans ses dernières volontés elle fait savoir à sa famille qu’elle ne veut pas qu’un arbre soit coupé pour la fabrication de son cercueil.

Alors, pour marquer symboliquement le départ de Wangari wa miti, un arbre est planté par sa descendance dans l’Uhruru parc, celui-là même pour lequel elle n’a pas hésité à donner de sa personne 22 ans plus tôt.

C’est du monde entier que les hommages affluent  pour saluer cette Âme, cette Reine qui aura durablement marqué les consciences de dizaines de millions de personnes.

Aujourd’hui encore, lorsque l’on demande à ses proches de décrire cette fille de Gikuyu, les mots sont sans appel : Engagée, généreuse, courageuse, cultivée, sincère…

Ces mots ne sont que l’écho de l’Amour dont cette Grande Dame a fait preuve tout au long de sa vie.

Wangari Muta Maathai ©namebet.com

Son Héritage

Le Centre Wangari Maathai à Paris © pavillon-arsenal.com

Cet Amour continue de vivre, toujours aussi intense, au travers de son héritage, son cadeau pour les générations actuelles et futures.

Le GBM continue son évolution et ses actions en faveur de la préservation de l’environnement.

Outre le Green Belt Movement, Wangari Maathai laisse derrière elle un institut de formation des élites aux problématiques environnementales : Le Wangari Maathai Institute for Peace & Environmental Studies inauguré en 2010 et rattaché à l’Université de Nairobi.

Elle a également mis en place une bourse pour les jeunes talents Kényans, afin que ceux-ci puissent poursuivre leurs études.

Pour conclure

Les Agikuyu sont un peuple à l‘Âme Guerrière. Ils n’hésitent pas à se lever quand il faut défendre leurs valeurs.

Ils sont intimement liés à la nature en tant que Nubi et liés à la forêt en tant que Bantu des terres. C’est un peuple de Terre.

Cet Esprit n’a pas choisi ce Peuple par hasard.
Wangari Mbuta Maathai est une femme qui au final est à l’image de l’Âme même de son Peuple.

Sa vie n’a été que perpétuelle résonnance avec l’Ancêtre Fondateur Gikuyu, avec l’Ancêtre Nu Bi.

La figure du combat écologique en Afrique ©Youtube
Auteur : Maduta Mà Úti
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